Perspectives économiques de l'OCDE, Volume 2022 Numéro 1

Pologne

Après une croissance vigoureuse au second semestre de 2021, la guerre en Ukraine va avoir de lourdes conséquences. Le taux de croissance du PIB réel devrait s’établir à 4.4 % en 2022 et à 1.8 % en 2023. La croissance de la consommation et, dans une moindre mesure, de l’investissement devrait considérablement ralentir, mais la politique budgétaire compensera en partie cet essoufflement. L’inflation devrait atteindre un pic d’ici la fin de l’année, avec une hausse des prix de l’énergie qui marquera le pas et le resserrement de la politique monétaire. Selon les projections, l’inflation sous-jacente devrait diminuer, mais restera sans doute élevée à la fin de 2023.

Les autorités devraient donner un tour de vis supplémentaire à la politique monétaire pour réduire l’inflation et stabiliser les anticipations d’inflation. La politique budgétaire devrait être ciblée sur les ménages vulnérables et le soutien aux réfugiés, mais son orientation devrait être globalement neutre. À moyen terme, des avancées dans la décarbonation de l’économie et la transformation numérique, soutenues par les politiques du marché du travail, pourraient conduire au renforcement de la sécurité énergétique et à une croissance plus verte et plus dynamique.

La guerre en Ukraine va ralentir la reprise

L’économie a connu une forte expansion au premier trimestre de 2022, la croissance vigoureuse de la production industrielle et des ventes au détail s’accompagnant d’une solide progression des salaires et d’un chômage faible. La hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation et les perturbations des chaînes d’approvisionnement ont persisté en 2022, exacerbées par la guerre en Ukraine. L’inflation globale annuelle a continué d’augmenter pour atteindre 11.4 % en avril 2022, tandis que l’inflation sous-jacente atteignait 8.6 %.

Pologne : Indicateurs sur l’activité économique et sur l’inflation

1. Indice des prix à la consommation, hors alimentation et énergie.

Source : Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, nº 111.

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Pologne : Demande, production et prix

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La guerre en Ukraine aura des répercussions majeures sur l’économie polonaise. L’inflation a bondi, aiguillonnée par la hausse des prix de l’énergie et des denrées alimentaires et par la dépréciation du zloty. Le retour des hommes ukrainiens dans leur pays a aggravé les pénuries de compétences dans la construction et les transports. En parallèle, plus de trois millions de réfugiés ukrainiens, majoritairement des femmes et des enfants, sont arrivés en Pologne. L’accès au marché du travail et aux prestations sociales leur étant désormais autorisé, la population active devrait s’étoffer de 350 000 travailleurs supplémentaires selon les projections, ce qui atténuerait les pénuries de compétences dans certains secteurs. Les échanges commerciaux directs avec la Russie, le Bélarus et l’Ukraine, qui représentent entre 3 et 5 % du PIB et 6 à 8 % des échanges totaux, vont diminuer : les exportations vont en effet reculer, tandis que les importations d’énergie seront réorganisées comme prévu, limitant l’impact de l’arrêt récent des importations de gaz naturel russe. La montée des incertitudes et la baisse de la confiance des consommateurs et des entreprises devraient également brider la croissance de la consommation et de l’investissement. Les dépenses des réfugiés en Pologne devraient néanmoins soutenir la croissance de la consommation.

La politique budgétaire expansionniste s’accompagnera d’un durcissement de la politique monétaire

Les dépenses budgétaires augmenteront pour protéger l’économie contre les conséquences de la guerre. Le « New Deal » polonais, mis en place en janvier, a été étendu. Le gouvernement a également constitué une réserve spéciale de 11 milliards de zlotys pour les réfugiés ukrainiens. Le « bouclier anti-inflation », qui a été adopté au début de l’année et devait initialement rester en place jusqu’à la mi-2022, sera prolongé, en toute hypothèse, jusqu’à la fin de 2022 pour protéger les ménages contre la hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation. Les dépenses nationales de défense devraient en outre grimper et passer de 2.2 % du PIB en 2022 à 3 % du PIB en 2023. Dans un contexte de hausse de l’inflation globale, de croissance des tensions inflationnistes sur le marché intérieur et d’expansion de la politique budgétaire, la Banque nationale de Pologne a continué de relever ses principaux taux d’intérêt à court terme, de 1.25 % en novembre à 5.25 % en mai. Les taux d’intérêt devraient continuer d’augmenter pour atteindre 8.5 % d’ici la fin de 2023.

L’économie devrait s’essouffler sur fond d’inflation et d’incertitude élevées

La croissance économique devrait considérablement ralentir au cours des deux prochaines années. L'inflation devrait rester élevée en 2022, mais atteindre un pic à la fin de l’année. Le fléchissement du revenu disponible réel et le degré élevé d’incertitude devraient exercer un effet de frein notable sur le rythme de consommation, et l’on s’attend également à un ralentissement de la croissance de l’investissement et des échanges commerciaux. Une augmentation des dépenses budgétaires amortira partiellement ces chocs en 2022, l’expansion du PIB réel devant s’établir à 4.4 % durant l’année. En 2023, les effets dus au climat de grande incertitude devraient se dissiper et, même si l’embargo annoncé par l’UE sur le pétrole russe exerce de nouvelles tensions à la hausse sur les prix de l’énergie, l’inflation globale devrait ralentir au fur et à mesure du resserrement de la politique monétaire. L’inflation sous-jacente devrait également s’atténuer, tout en restant forte. La politique budgétaire soutiendra l’activité, stimulée par les dépenses financées par les ressources de la Facilité pour la reprise et la résilience de l’UE, mais le durcissement de la politique monétaire érodera la croissance. Dans l’ensemble, la croissance du PIB réel devrait refluer à 1.8 % en 2023.

Ces perspectives sont entourées d’une incertitude considérable, et la balance des risques est orientée à la baisse. Une nouvelle escalade de la guerre accentuerait l’incertitude, exacerberait l’inflation et mettrait les finances publiques à rude épreuve. Des perturbations supplémentaires des approvisionnements en énergie porteraient un coup à la croissance. Des tensions persistantes sur le marché du travail et une croissance continue de la consommation pourraient entraîner une nouvelle hausse de l’inflation. Au versant positif, une résolution rapide de la guerre stimulerait la croissance du PIB et réduirait l’inflation.

Les politiques devraient être coordonnées et faciliter la transition verte et la transition numérique

L’orientation de la politique budgétaire d’ensemble devrait être globalement neutre pour venir en complément de la politique monétaire, tout en continuant à protéger les ménages les plus vulnérables contre l’inflation. La diversification des importations énergétiques, ainsi qu’il est prévu, et le développement de l’investissement dans les énergies renouvelables permettraient d’améliorer la sécurité énergétique et favoriseraient une croissance plus verte. Les pouvoirs publics devraient encourager les entreprises à avoir plus largement recours aux technologies numériques pour gagner en productivité. Les politiques du marché du travail peuvent contribuer à cet objectif en rehaussant le faible niveau des compétences de base, notamment parmi la population adulte plus âgée, et en améliorant les possibilités de formation continue, en particulier pour les chômeurs et les personnes peu qualifiées, l’accent devant être mis sur les compétences utiles pour la double transition verte et numérique. Des aides renforcées à la garde d’enfants et à l’apprentissage de la langue seraient de nature à faciliter l’intégration des réfugiés sur le marché du travail.