Perspectives économiques de l'OCDE, Volume 2022 Numéro 1

Corée

La croissance ralentira pour s’établir à 2.7 % en 2022 puis à 2.5 % en 2023. La consommation devrait se renforcer, mais elle sera freinée par une inflation élevée. À partir du début de 2023, la croissance s’accélèrera en raison de la vigueur de l’investissement et des exportations, compte tenu de la dissipation attendue des incertitudes actuelles. L’endettement considérable des ménages, les prix élevés des logements et des hausses de taux d’intérêt plus marquées que prévu pourraient affaiblir la demande intérieure. Une pénurie potentielle de gaz rares en provenance de Russie et d’Ukraine pourrait peser sur les exportations de semi-conducteurs.

Les autorités monétaires devraient veiller à ce que les anticipations d’inflation restent ancrées. Les pouvoirs publics devraient adopter des mesures de soutien budgétaire de manière à éviter d’accentuer les tensions actuelles sur les prix, en apportant une aide maximale aux personnes les plus vulnérables à un coût réduit. Des réformes structurelles devraient faciliter un redéploiement de la main-d’œuvre et du capital vers les secteurs en expansion et combler des lacunes majeures dans le système de protection sociale. Des mesures s’imposent aussi pour renforcer la résilience des chaînes d’approvisionnement essentielles et la sécurité énergétique.

Corée : Indicateurs sur l’inflation et sur les exportations

Source : Banque de Corée.

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Corée : Demande, production et prix

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La reprise a ralenti

Après un net rebond en 2021, la croissance du PIB réel a reflué à 2.9 % (taux annualisé corrigé des variations saisonnières en glissement trimestriel) au premier trimestre de 2022. Si la croissance des exportations a été vigoureuse, sous l’impulsion de la demande de semi-conducteurs, la consommation privée est restée à la traîne, du fait des restrictions appliquées aux services impliquant de nombreux contacts physiques. L’allégement progressif des mesures de distanciation devrait contribuer au redressement de la consommation. Néanmoins, l’indice des commandes à l’exportation a enregistré sa baisse la plus marquée depuis deux ans en avril, en raison de la guerre en Ukraine et des mesures de confinement adoptées en Chine. L’inflation globale mesurée par les prix à la consommation a atteint 5.4 % en mai 2022, soit le taux le plus élevé depuis plus de dix ans, essentiellement sous l’effet de l’envolée des prix des matières premières. L’inflation sous-jacente s’est hissée à 3.4 %, ce qui s’explique par un élargissement des tensions sur les prix à certaines catégories de biens et services, dont l’ameublement et la restauration. Les taux d’emploi et de sous-utilisation de la main-d’œuvre ont renoué avec leurs niveaux d’avant la crise.

Les conséquences économiques directes de la guerre en Ukraine et des sanctions prises contre la Russie ont été relativement modestes pour la Corée, compte tenu de ses liens commerciaux et financiers directs limités avec ces deux pays et de sa faible dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie. Cependant, les prix de l’énergie et des matières premières ont augmenté sensiblement, ce qui a renforcé l’inflation. Le prix du néon, gaz qui joue un rôle essentiel dans la production coréenne de semi-conducteurs, a triplé au début de 2022 en glissement annuel, mais l’impact de cette hausse sur la production de semi-conducteurs est resté limité pour le moment, grâce à la constitution de stocks de matières premières, à la diversification des importations et à la création de capacités de production de néon sur le territoire coréen. Les autorités investissent aussi dans la recherche‑développement (R‑D) pour localiser dans le pays la production d’autres intrants, comme le krypton et le xénon.

Certaines mesures de soutien temporaires ont été prolongées

Les aides au maintien dans l’emploi liées à la pandémie ont été prolongées jusqu’à la fin de 2022, et une rallonge budgétaire de 16 900 milliards KRW (0.8 % du PIB) a été votée en février 2022 pour venir en aide aux petites entreprises. L’Assemblée nationale a récemment adopté le collectif budgétaire le plus important de toute l’histoire de la Corée, représentant 62 000 milliards KRW (2.9 % du PIB), qui doit être principalement financé par des plus-values de recettes fiscales. En outre, la réduction temporaire de 20 % des taxes sur l’essence, le gazole et le gaz de pétrole liquéfié (GPL) a été portée à 30 % et prolongée jusqu’à la fin de juillet 2022. Cependant, la politique budgétaire devrait devenir légèrement restrictive en 2023, compte tenu du démantèlement supposé des mesures temporaires. La Banque de Corée a entamé un processus de normalisation de sa politique monétaire : elle a relevé son principal taux directeur en cinq étapes de 0.5 % à 1.75 % et laissé entrevoir une poursuite de ce resserrement. Les projections reposent sur l’hypothèse que le principal taux directeur atteindra 2.5 % à la fin de 2023.

La reprise se poursuivra à un rythme plus lent, mais l’incertitude est grande

Le PIB réel devrait croître de 2.7 % en 2022 puis de 2.5 % en 2023. La consommation privée se redressera à partir de la fin du printemps, sous l’effet d’un taux d’immunité élevé, de la levée des restrictions, de la dernière rallonge budgétaire et d’une poursuite de la normalisation du taux d’épargne des ménages. Le redressement de la consommation devrait néanmoins être progressif, les tensions inflationnistes dues aux prix des matières premières et aux perturbations des chaînes d’approvisionnement étant répercutées sur les consommateurs. L’inflation devrait rester élevée, sachant que l’on part du principe que l’embargo sur le pétrole russe tirera les prix mondiaux de cet hydrocarbure vers le haut en 2023. L’investissement des entreprises devrait enregistrer une croissance soutenue, compte tenu des investissements importants prévus dans des secteurs clés. Le solde primaire sous-jacent devrait se réduire légèrement. Un relèvement plus rapide que prévu des taux d’intérêt pourrait freiner la consommation des ménages, dans la mesure où leurs dettes considérables ont pour l’essentiel été contractées à des taux variables. Une guerre prolongée en Ukraine pourrait nuire à la production de semi-conducteurs de la Corée, étant donné que les stocks de gaz rares s’épuisent et que l’offre locale de matières premières est inférieure à la demande.

De nouvelles mesures s’imposent pour assurer une reprise résiliente

Réduire les aides budgétaires et mieux les cibler sur ceux qui en ont le plus besoin contribueraient à endiguer l’inflation et à remédier aux carences structurelles. La réduction temporaire des prix des combustibles fossiles devrait être remplacée en temps voulu par des transferts aux ménages vulnérables. Il est indispensable de renforcer les dispositifs de formation et d’activation destinés aux personnes qui perdent leur emploi, ainsi que le système de protection sociale, pour faciliter le redéploiement de la main‑d’œuvre. Des mesures s’imposent aussi pour accroître la résilience des chaînes d’approvisionnement essentielles. Le gouvernement prévoit de mettre sur pied un Comité pour la sécurité économique et la gestion des chaînes d’approvisionnement. Cela devrait aller de pair avec l’élaboration de mécanismes cohérents et fondés sur des données probantes permettant de faire des choix éclairés ainsi que d’améliorer la transparence et la confiance du secteur privé. Outre le projet du nouveau gouvernement de relancer le secteur du nucléaire, d’autres initiatives permettant d’accélérer la transition écologique, telles que l’alignement du système coréen d’échange de quotas d’émission (K-ETS, Korean Emissions Trading Scheme) sur l’objectif de neutralité en matière de gaz à effet de serre fixé à l’horizon 2050, seront nécessaires pour améliorer la sécurité énergétique.