Perspectives économiques de l'OCDE, Volume 2022 Numéro 1

Australie

Le PIB réel devrait croître de 4.2 % en 2022 et de 2.5 % en 2023. La reprise vigoureuse suite à la pandémie va se poursuivre, l’économie australienne ayant surmonté la récente recrudescence des infections au COVID-19 ainsi que les graves inondations qui ont frappé les États du Queensland et de la Nouvelle-Galles du Sud. Compte tenu des tensions qui pèsent déjà sur le marché du travail et les chaînes d’approvisionnement mondiales, les pressions sur les salaires et sur les prix s’accroîtront, avant de s’atténuer en 2023.

La normalisation de la politique monétaire a été amorcée, la Banque de Réserve d’Australie ayant relevé en mai son taux au jour le jour pour la première fois en une décennie. Une poursuite du resserrement monétaire sera nécessaire pour contenir l’augmentation des tensions sur les prix et ramener l’inflation vers l’objectif. La baisse temporaire du droit d’accise sur les carburants, décidée dans un contexte d’inquiétudes relatives au pouvoir d’achat, doit prendre fin le 28 septembre 2022 en l’état actuel de la législation. Les risques que présente la guerre en Ukraine pour la sécurité énergétique mondiale mettent en lumière la nécessité de poursuivre la transition vers une production plus importante d’énergie renouvelable. À moyen terme, une réforme fiscale visant à réduire la forte dépendance de l’Australie à l’égard de l’imposition des revenus des personnes physiques permettrait d’atténuer la vulnérabilité des finances publiques face au vieillissement de la population.

L’activité économique s’est montrée résiliente mais l’inflation a augmenté

La reprise suite à la pandémie s’est poursuivie malgré la hausse du nombre d’infections au COVID‑19 au premier trimestre de 2022 et les graves inondations qui ont frappé le Queensland et la Nouvelle‑Galles du Sud en février et en mars. Bien que les cas de COVID‑19 aient atteint des niveaux inédits dans le pays, les indicateurs de la consommation privée et de l’activité manufacturière ont bien résisté ces derniers mois. Le marché du travail s’est considérablement tendu, le taux de chômage s’établissant à 3.9 % en avril, son plus bas niveau depuis 1974, à la faveur de la reprise économique vigoureuse et du reflux de l’immigration durant la pandémie. Dans ce contexte, la croissance des salaires a donné des signes d’accélération et l’inflation, accentuée par les perturbations des chaînes d’approvisionnement, a augmenté. Les prix à la consommation ont bondi de 5.1 % en glissement annuel au premier trimestre de 2022, l’inflation sous-jacente atteignant 3.7 %. Il s’agit du plus haut niveau d’inflation depuis la crise financière mondiale.

Australie : Indicateurs sur l’inflation et sur le marché du travail

1. Le taux de sous-emploi tient compte des travailleurs à temps partiel qui préféreraient travailler davantage, ainsi que des actifs qui travaillent généralement à temps plein mais sont actuellement à temps partiel.

Source : Bureau australien de la statistique (ABS, Australian Bureau of Statistics).

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Australie : Demande, production et prix

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Si l’impact direct de la guerre en Ukraine sur l’économie australienne a été limité, le conflit, tout comme les récents confinements stricts imposés en Chine, ont amplifié les problèmes de chaîne d’approvisionnement auxquels l’Australie est confrontée. La hausse des prix de l’énergie à l’échelle mondiale a déjà affecté les consommateurs australiens et entraîné une accélération de l’inflation, même si les anticipations d’inflation restent à des niveaux modérés. Toutefois, le renchérissement des matières premières a amélioré les termes de l’échange de l’Australie, et le dynamisme de la demande mondiale de céréales soutiendra les exportations à l’heure où la guerre perturbe la production en Ukraine.

La politique monétaire sera resserrée

Face aux tensions inflationnistes, la Banque de Réserve de l’Australie a relevé son taux au jour le jour de 25 points de base pour le porter à 0.35 %, en mai, procédant ainsi à sa première hausse de taux en plus d’une décennie. D’autres relèvements seront nécessaires pour ramener l’inflation dans la fourchette cible, comprise entre 2 et 3 %, les projections de l’OCDE postulant que le taux au jour le jour atteindra 2.5 % d’ici à la fin de 2023. La banque centrale a par ailleurs mis fin à ses achats d’obligations d’État, ce qui se traduira par une réduction importante mais progressive de son bilan à mesure que les titres arriveront à maturité. L’essentiel du soutien budgétaire lié à la pandémie a été retiré. Néanmoins, ce retrait sera partiellement compensé par une série de nouvelles mesures de dépense annoncées dans le cadre du budget fédéral à la suite de recettes exceptionnelles engrangées grâce à la reprise plus vigoureuse que prévu et aux cours élevés des matières premières. Si ces recettes serviront pour partie à réduire le déficit fédéral, le gouvernement a également fait part de plusieurs mesures visant à atténuer les tensions sur le pouvoir d’achat, dont un crédit d’impôt et une baisse du droit d’accise sur les carburants pendant six mois. Globalement, l’orientation de la politique budgétaire devrait être légèrement restrictive en 2022, puis essentiellement neutre en 2023.

La reprise économique se poursuivra dans un contexte de tensions inflationnistes croissantes

La reprise économique devrait se poursuivre, la croissance du PIB réel atteignant 4.2 % en 2022 et 2.5 % en 2023. À court terme, la croissance sera tirée par les cours élevés des matières premières et l’amélioration des termes de l’échange. La vigueur du marché du travail et la baisse progressive du taux d’épargne soutiendront l’augmentation de la consommation des ménages. Les perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales, le haut niveau des prix de l’énergie et la croissance des salaires dans un marché de l’emploi tendu exerçant des tensions sur les prix, l’inflation devrait rester élevée à court terme avant de refluer en 2023 à mesure que les problèmes d’approvisionnement seront résolus et que la demande intérieure fléchira sous l’effet de politiques monétaire et budgétaire moins accommodantes. Toutefois, l’embargo sur le pétrole russe récemment décidé par l’Union européenne exercera des tensions à la hausse sur l’inflation en 2023. La hausse des prix mondiaux du pétrole se répercutera sur les combustibles et autres produits composant le panier de consommation, compensant en partie l’atténuation de l’inflation qui résultera d’une dissipation des perturbations des chaînes d’approvisionnement. Les frontières internationales ayant été rouvertes en février, l’immigration de travailleurs qualifiés augmentera, mais ne devrait pas suffire à atténuer véritablement les tensions sur le marché du travail. Dans un contexte de fortes tensions inflationnistes mondiales associées à un marché du travail tendu, l’inflation risque de s’accélérer encore en Australie et de conduire la banque centrale à resserrer de manière plus énergique sa politique monétaire, ce qui pourrait avoir des conséquences négatives pour la consommation, l’investissement et la croissance économique plus généralement. Enfin, la pandémie reste une menace pour la reprise, l’apparition d’un nouveau variant du COVID‑19 très contagieux ou virulent pouvant entraîner à nouveau l’instauration de restrictions, même s’il est peu probable que le pays prenne des mesures aussi strictes que celles imposées en 2020 et 2021.

Réformer la fiscalité devrait constituer la priorité à moyen terme

Un nouveau resserrement substantiel de la politique monétaire est nécessaire pour limiter la progression de l’inflation. La baisse des droits d’accise sur les carburants doit prendre fin le 28 septembre 2022 en l’état actuel de la législation. Tout soutien supplémentaire au pouvoir d’achat qui sera nécessaire au‑delà de cette date devrait être ciblé davantage au bénéfice des ménages à revenu faible et prendre une forme qui n’entraîne pas de distorsions des signaux de prix. Compte tenu des risques que la guerre en Ukraine fait peser sur la sécurité énergétique, la transition vers la production d’énergie renouvelable devrait être davantage encouragée, et assortie d’investissements supplémentaires dans le réseau de distribution. La reprise actuelle serait par ailleurs une bonne occasion de réduire la forte dépendance de l’Australie à l’égard de l’imposition des revenus des personnes physiques, qui accentue la vulnérabilité des finances publiques face au vieillissement de la population. Il faudrait en outre envisager d’accroître la taxe sur les biens et services ou d’en élargir l’assiette, de réduire les allégements fiscaux relatifs aux pensions privées et les déductions d’impôt accordées au titre des plus‑values, et de poursuivre le remplacement du droit de timbre par une fiscalité foncière périodique. De telles réformes assureraient une base d’imposition plus durable. Comme d’autres pays de l’OCDE, l’Australie gagnerait à réviser le cadre de sa politique monétaire. Le processus de révision devrait être transparent, comprendre une consultation des différentes parties prenantes et s’appliquer à un large périmètre, qui pourrait inclure un examen du mandat de la banque centrale, de ses instruments monétaires, de ses méthodes de communication externe, de ses procédures de recrutement et de son organisation interne.