Perspectives économiques de l'OCDE, Volume 2022 Numéro 1

Espagne

La croissance devrait refluer à 4.1 % en 2022 et à 2.2 % en 2023 en raison de la montée des incertitudes, du niveau élevé de l’inflation et du fléchissement de la demande extérieure. L’épargne accumulée par les ménages pendant la pandémie, le train de mesures budgétaires mis en place pour atténuer les effets de la guerre, le redressement continu de l’emploi et les fonds versés au titre du plan « Next Generation EU » viendront soutenir la demande intérieure. La reprise en cours du tourisme appuiera également la croissance. L’inflation globale va se modérer en 2023, mais restera élevée.

La politique budgétaire devrait continuer de soutenir l’économie en 2022-23, mais les autorités devront trouver un équilibre entre resserrement progressif et aides temporaires bien ciblées permettant de protéger les entreprises et les ménages vulnérables contre le niveau élevé de l’inflation. Il convient de poursuivre les efforts engagés pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans les secteurs des transports et des bâtiments et accélérer la réduction de la dépendance à l’égard des combustibles fossiles pour atteindre les objectifs ambitieux qui ont été fixés en matière de décarbonation et améliorer la sécurité énergétique.

La croissance a ralenti

Le variant Omicron, le niveau élevé de l’inflation et la guerre en Ukraine ont ramené la croissance du PIB à 0.3 % au premier trimestre de 2022, celui-ci restant inférieur de 3.5 % à son niveau d’avant la pandémie. Après avoir s’être établie à 9.8 % en mars, l’inflation globale est descendue à 8.5 % en mai, tandis que l’inflation sous-jacente s’est hissée à 4.9 %. Compte tenu du caractère pluriannuel des négociations collectives et de la faible proportion de clauses d’indexation des salaires, la progression des salaires reste modérée. Le taux de rémunération a augmenté de 1.3 % au premier trimestre de 2022 en glissement annuel. Depuis le mois de mars, la confiance des consommateurs et des entreprises s’est détériorée, tout comme les indicateurs d’activité dans le secteur manufacturier et les services. Les créations d’emplois se sont accélérées en avril et la part des contrats permanents dans les nouveaux contrats a grimpé d’environ 10 % en 2021, pour s’établir à 48 %. La reprise du tourisme s’est affermie, les dépenses des touristes étrangers ayant atteint, en mars 2022, 84 % du niveau correspondant en mars 2019.

Espagne : Indicateurs sur l’inflation et sur l’activité économique du tourisme

1. Les données relatives à la hausse des prix de l’énergie en 2022 et à l’inflation globale et l’inflation sous-jacente pour mai 2022 sont provisoires.

Source : Institut national espagnol de statistique (INE, Instituto Nacional de Estadística).

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Espagne : Demande, production et prix

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La guerre en Ukraine pèse sur l’économie espagnole via la hausse des prix de l’énergie, les perturbations des chaînes de production et la montée des incertitudes, les échanges commerciaux directs de l’Espagne avec la Russie et l’Ukraine étant limités, tout comme son exposition financière à ces deux pays. La baisse de la confiance et du revenu disponible réel a entraîné une diminution de la consommation privée au premier trimestre de 2022. L’accord conclu avec Bruxelles en vue de limiter le prix du gaz entrant sur le marché de l’électricité de la péninsule ibérique, qui devrait entrer en vigueur en juin, peut contribuer à contenir l’inflation globale. À la fin mai, 59 000 réfugiés ukrainiens avaient été pris en charge par les autorités.

La politique budgétaire continue de soutenir l’économie

La politique budgétaire devrait rester expansionniste en 2022-23. À la faveur de la solide croissance des recettes et de la suppression progressive des dépenses liées à la pandémie de COVID-19, le déficit budgétaire a été ramené à 6.9 % du PIB en 2021 et devrait s’établir à 4.2 % du PIB en 2023. Pour contrer les effets négatifs de la guerre, le gouvernent a approuvé en mars un plan prévoyant la mise en place d’une subvention sur les ventes au détail de carburant, la prolongation de la réduction des taxes sur l’énergie, des aides directes au secteur des transports et aux secteurs à forte consommation d’électricité, un programme d’accueil des réfugiés et la création d’une nouvelle ligne de crédit pour les entreprises vulnérables (10 milliards EUR, 0.6 % du PIB). Les mesures de soutien direct destinées à amortir l’impact de la hausse des prix de l’énergie (6 milliards EUR, 0.4 % du PIB), qui arrivent à expiration en juin, devraient être prolongées jusqu’en septembre. Le mécanisme adopté pour compenser la baisse du pouvoir d’achat des pensions permettra de soutenir le revenu des ménages, mais grèvera les dépenses publiques pendant la période considérée. L’exécution des fonds provenant du plan « Next Generation EU » s’est accélérée au premier trimestre de 2022 et devrait être concentrée sur la période 2022-23.

Le rythme de la croissance va ralentir

Le PIB devrait croître de 4.1 % en 2022 et de 2.2 % en 2023. Le niveau élevé de l’inflation et l’incertitude pèseront sur les dépenses des ménages. Les goulets d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement en semiconducteurs entraveront également l’investissement privé et les exportations de marchandises. Les retombées négatives de la guerre seront partiellement compensées par l’impulsion donnée par le train de mesures budgétaires adopté en mars, le déploiement des projets d’investissement financés au titre du plan « Next Generation EU », l’atténuation de l’incertitude entourant la pandémie et la reprise du tourisme. L’inflation devrait reculer en 2023, à la faveur du sous-emploi persistant de la main-d’œuvre et de la répercussion supposée modérée de la hausse des prix sur les salaires, mais elle devrait tout de même rester élevée en raison de l’impact de l’embargo de l’UE sur le pétrole russe. Il existe un risque que l’inflation se maintienne durablement à un niveau plus élevé si les marchés de l’énergie subissent de nouvelles perturbations ou si la hausse des prix se répercute dans une plus large mesure sur les prix finaux et les salaires. L’escalade la guerre en Ukraine ou de nouvelles vagues de COVID-19 constituent des risques de divergence à la baisse par rapport aux prévisions de croissance, tandis qu’une utilisation et un impact économique des fonds de l’UE plus élevés que prévu seraient de nature à stimuler davantage la croissance.

Des réformes et des investissements s’imposent pour promouvoir la transition verte

Les aides budgétaires visant à contrer les effets à court terme du choc énergétique sur les ménages vulnérables et les entreprises devraient être correctement ciblées et avoir un caractère temporaire. Une stratégie d’assainissement budgétaire à moyen terme, fondée sur des examens des dépenses, doit être mise en œuvre pour commencer à réduire progressivement le déficit budgétaire et le ratio dette publique/PIB. Bien que la proportion d’accords salariaux assortis de clauses d’indexation demeure modeste, elle augmente, d’où la nécessité que les partenaires sociaux s’entendent pour partager les coûts et éviter la formation d’une spirale salaires-prix. Établir un meilleur climat de certitude pour les investisseurs, coopérer étroitement avec les partenaires européens pour améliorer l’interconnectivité avec le reste de l’Europe et renforcer l’efficacité énergétique sont des conditions essentielles pour assurer la sécurité énergétique et promouvoir la transition verte. Compte tenu des objectifs climatiques ambitieux qui ont été fixés, il sera nécessaire d’établir un cadre réglementaire prévisible et de long terme, d’offrir des incitations suffisantes propres à mobiliser l’investissement privé, ainsi que de mettre l’accent sur l’amélioration du stockage, la gestion de la demande et la transformation numérique pour utiliser les énergies renouvelables de façon efficace. Les autorités peuvent appuyer la transition numérique et la transition verte et stimuler la croissance de la productivité en veillant à ce que le plan de relance soit mis en œuvre efficacement et en temps voulu.