Perspectives économiques de l'OCDE, Volume 2022 Numéro 1

République tchèque

L’économie tchèque devrait enregistrer une croissance de 1.8 % en 2022 puis de 2 % en 2023. Des perturbations persistantes des approvisionnements, la hausse des prix et l’incertitude générale liée à la guerre en Ukraine freinent la reprise. Le commerce et la production manufacturière ralentiront. Les tensions sur le marché du travail soutiendront le revenu des ménages, mais la dégradation de la confiance et la montée des prix pèseront sur la demande intérieure. L’inflation devrait continuer d’augmenter, avant de revenir peu à peu vers la marge de fluctuation définie autour de l’objectif de 2 %.

Depuis juin 2021, la Banque nationale tchèque a relevé son taux directeur de 550 points de base au total, si bien qu’il s’établissait à 5.75 % en mai 2022, et de nouvelles hausses sont envisagées jusqu’à l’été 2022. Un assainissement progressif des finances publiques en termes structurels est prévu à compter de cette année. Des mesures ciblées d’aide au revenu sont adaptées pour protéger les personnes vulnérables contre le renchérissement de l’énergie. Un cadre plus solide pour la politique d’immigration et des programmes visant à promouvoir l’intégration des réfugiés sur le marché du travail contribueraient à réduire des pénuries de main-d’œuvre récurrentes.

La reprise ralentit

Les conséquences négatives de la guerre en Ukraine sur le commerce mondial et les chaînes d’approvisionnement ainsi que les tensions à la hausse sur les prix de l’énergie et des matières premières découlant du conflit ont provoqué un ralentissement de la reprise. La croissance de l’activité manufacturière et des exportations a fléchi. La confiance des agents économiques s’est dégradée dans certains secteurs, notamment pour les ménages, qui font face à des hausses brutales des prix à la consommation. L’inflation mesurée par les prix à la consommation a atteint 14.2 % en avril et la volatilité du taux de change s’est accentuée. Le marché du travail reste tendu, le taux de chômage s’établissant à 2.4 % au premier trimestre de 2022. Cependant, les salaires nominaux ont augmenté plus lentement que les prix à la consommation, et les salaires réels diminuent.

République tchèque : Indicateurs de confiance et sur l’inflation

Source : Refinitiv ; et OCDE, base de données sur les indices des prix à la consommation.

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République tchèque : Demande, production et prix

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Du fait de sa spécialisation dans le secteur manufacturier, la construction automobile en particulier, la République tchèque est très exposée aux perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales et à la hausse des prix des matières premières. Elle est en outre fortement tributaire de la Russie pour ses importations d’énergie. Par ailleurs, dans le cadre des efforts déployés pour cesser progressivement de produire de l’électricité à partir de charbon, la République tchèque a prévu de s’appuyer de plus en plus sur le gaz naturel. Jusqu’à la fin du mois de mai 2022, elle a accordé le statut de protection temporaire à quelque 350 000 réfugiés ukrainiens (3 % de la population totale). Les autorités ont mis en place une « allocation humanitaire » destinée aux réfugiés et facilité leur accès à l’emploi en termes de démarches administratives. Environ 50 000 réfugiés ont déjà trouvé du travail.

Il existe des marges de manœuvre budgétaires pour protéger les plus vulnérables

Compte tenu de l’accélération de l’inflation et des signes de désancrage des anticipations d’inflation, la Banque nationale tchèque (CNB, Ceská Národní Banka) a relevé son taux directeur de 0.25 % à 5.75 % entre juin 2021 et mai 2022. La CNB est également intervenue sur le marché des changes pour neutraliser les pressions à la baisse exercées sur la monnaie tchèque. Les prévisions reposent sur l’hypothèse que le taux directeur augmentera encore, pour s’établir à 6.25 % en juin. En outre, la CNB a décidé de rehausser le taux du volant de fonds propres contracyclique pour les expositions situées en République tchèque et de le porter par étapes successives de 0.5 % à 1 % (à compter du 1^er juillet 2022), puis de continuer à le relever par paliers jusqu’à 2.5 % à compter d’avril 2023. Elle a en outre réinstauré des plafonds pour les nouveaux prêts hypothécaires (fondés sur le ratio dette/revenu et sur le ratio service de la dette/revenu), afin de limiter l’accumulation de risques sur le marché du logement. Dans le but de protéger les ménages et les entreprises contre la hausse des prix, et des coûts de l’énergie en particulier, les autorités ont adopté diverses mesures budgétaires. Elles prennent notamment la forme d’une réduction temporaire des droits d’accise sur le gazole et l’essence, de garanties publiques de prêts pour les petites et moyennes entreprises (PME) affectées par le renchérissement de l’énergie, d’un report des paiements de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les entreprises du secteur des transports, ainsi que d’une hausse des allocations de logement et d’un élargissement de leur champ d’application. En outre, les services publics nécessaires en matière d’aide aux réfugiés exigent aussi un surcroît de dépenses. Globalement, les autorités entendent toutefois durcir la politique budgétaire à moyen terme, et un assainissement des finances publiques en termes structurels est anticipé pour 2022 et 2023, tel qu’il a été budgété.

La croissance restera modérée en 2023

La croissance du PIB ralentira en 2022. Le commerce et l’investissement privé fléchiront en raison des perturbations des approvisionnements à l’échelle mondiale. La dégradation de la confiance et la hausse des prix freineront la consommation privée, même si cette dernière sera soutenue par la persistance d’une épargne importante et par un marché du travail tendu. Après avoir continué de se renforcer en 2022, l’inflation commencera à diminuer au second semestre de 2022. Ce recul de l’inflation ne sera que progressif, en raison de nouvelles augmentations des cours du pétrole – au début de 2023 – liées à l’embargo sur cet hydrocarbure. La croissance du PIB restera modérée en 2023. Les effets de la crise ukrainienne sur les chaînes d’approvisionnement mondiales et les prix s’estomperont et les exportations et l’investissement se redresseront, mais la hausse des prix continuera de peser sur la demande intérieure. L’incertitude est très forte. Des pressions prolongées exercées sur les chaînes d’approvisionnement mondiales accentueraient encore l’inflation et provoqueraient une dépréciation de la monnaie tchèque, ce qui pourrait contraindre la CNB à durcir sa politique monétaire encore plus vigoureusement. Une crise énergétique s’inscrivant dans la durée (des prix de l’énergie encore plus élevés ou une perturbation des approvisionnements énergétiques) et un nouvel afflux de réfugiés pourraient se traduire par une accentuation des tensions sur les dépenses publiques.

Libérer l’offre de main-d’œuvre et verdir l’économie stimuleraient la croissance

La CNB a judicieusement durci sa politique monétaire pour faire face à la hausse rapide des prix à la consommation et aux craintes relatives aux anticipations d’inflation. Sur le plan budgétaire, les mesures de soutien visant à atténuer la hausse des prix de l’énergie devraient correspondre à un juste équilibre entre le besoin immédiat de sécurité énergétique et de protection des revenus disponibles et la transition vers une économie décarbonée. En outre, il est important de placer la dette publique sur une trajectoire viable à long terme, notamment en réformant le système de retraite. Un accroissement de l’offre de main‑d’œuvre intérieure (grâce à une augmentation du taux d’emploi des mères de famille et des seniors), une meilleure adéquation entre l’offre et les besoins de compétences et un recours plus efficace à la politique d’immigration contribueraient à permettre d’attirer et de conserver une main-d’œuvre productive et qualifiée. Investir dans les énergies renouvelables et la mobilité électrique réduirait la dépendance à l’égard des marchés du gaz et du pétrole et favoriserait la reprise.