L’égalité entre les femmes et les hommes est l’un des objectifs des politiques de recherche et d’innovation de nombreux pays et organisations. Il s’agit de garantir aux femmes et aux hommes les mêmes possibilités de participation et opportunités, de l’instruction obligatoire jusqu’aux carrières de recherche où les femmes doivent avoir les mêmes opportunités que les hommes, des postes de début de carrière jusqu’aux postes décisionnels importants. L’objectif est également d’intégrer la dimension hommes-femmes dans le contenu de la recherche, en tenant compte des caractéristiques biologiques, sociales et culturelles des hommes et des femmes. Dans la zone OCDE, environ 30 % des titulaires d’un diplôme de sciences naturelles, d’ingénierie ou de TIC sont des femmes, ce qui témoigne d’une sous-représentation considérable. De plus, la part des femmes dans la population des auteurs scientifiques correspondants, proche de 22 %, est très inférieure au pourcentage de femmes diplômées dans l’enseignement supérieur et au niveau doctoral. Ce pourcentage est même encore plus faible dans les sous-groupes d’auteurs ayant des responsabilités décisionnelles, c’est-à-dire les auteurs qui ont des revenus élevés, une activité rémunérée de recension, une activité éditoriale, ou qui se consacrent entièrement à la recherche. Un point pourrait s’avérer préoccupant : la relative sous-représentation des femmes dans certaines activités extérieures de plus en plus valorisées dans les exercices d’évaluation de la recherche publique, telles que la citation de de travaux de recherche dans des rapports des médias ou dans des documents techniques tels que les brevets.
Science, technologie et industrie : Tableau de bord de l'OCDE 2017
3. Agir maintenant au service de l’innovation
Place aux femmes dans la science et l’innovation
Place aux femmes dans la science et l’innovation
La contribution des femmes au développement de nouvelles technologies, mesurée en pourcentage des brevets ayant au moins une inventrice, s’échelonne d’environ 4 % en moyenne en Autriche à plus de 15 % en moyenne au Portugal. Entre 2012 et 2015, des femmes ont figuré parmi les inventeurs de 10 % des brevets aux États-Unis, et de 7 % des brevets au Japon. La part des femmes dans la population des inventeurs varie également beaucoup d’un domaine technologique à un autre. Dans la plupart des pays, la contribution des femmes aux inventions brevetées est la plus élevée dans le secteur pharmaceutique (jusqu’à 42 % en Espagne) et les biotechnologies (49 % en Pologne), et la plus faible dans le génie civil et les télécommunications (0.3 % en Autriche et en République tchèque). Les facteurs qui peuvent expliquer les tendances observées sont notamment les différences de spécialisation technologique et sectorielle des pays, la proportion de diplômées dans les disciplines scientifiques, et le degré de participation des femmes au marché du travail.
Comment recenser les inventrices
Pour recenser les inventrices, on utilise des dictionnaires de genre des noms, spécifiques pour chaque pays, que l’on croise avec les noms des inventeurs et inventrices cités dans les brevets (pour de plus amples informations, voir Lax Martínez, Raffo et Saito, 2016). Les statistiques sont disponibles uniquement pour les économies où plus de 80 % des prénoms peuvent être clairement attribués à l’un ou l’autre des sexes. Comme il est difficile de faire la distinction entre les noms d’inventeurs et d’inventrices dans les économies d’Asie, il n’a pas été possible de calculer cet indicateur pour des économies comme la Chine et la Corée. Les données se rapportent aux familles IP5 par date de dépôt du brevet, et sont groupées en fonction du lieu de résidence et du sexe de la personne à l’origine de l’invention, avec des comptages fractionnaires. Les brevets sont affectés aux domaines technologiques sur la base de leurs codes dans la Classification internationale des brevets (CIB), suivant la concordance établie par l’OMPI (2013).
Comment mesurer la représentation des femmes dans la science
On estime la représentation des femmes dans la science sur la base des informations rapportées par les autrices elles-mêmes dans une enquête pilote conduite par l’OCDE auprès des autrices et des auteurs scientifiques en juillet 2015 (http://oe.cd/issa). L’échantillon est tiré des documents publiés en 2011 et indexés dans la base Scopus. On s’intéresse aux personnes désignées dans les documents comme « auteurs correspondants ». Les domaines couverts dans cette étude sont les suivants : Arts et lettres, Commerce, Génie chimique, Immunologie et microbiologie, Science des matériaux, Neurosciences, Physique et Astronomie. Les moyennes pondérées tiennent compte de la structure de l’échantillon et des schémas de non-réponse par domaine, pays d’affiliation et statut de la revue. Dans le graphique, on peut évaluer la représentation des femmes, en valeur absolue ou relative, selon différentes caractéristiques liées à la recherche scientifique en comparant les chiffres obtenus à la valeur de référence de 50 % ou à la proportion de femmes dans la population considérée. Les fichiers à usage public contenant les micro-données de l’enquête pilote ISSA de 2015 peuvent être téléchargés à des fins de recherche depuis le site du projet.
Financer la recherche à long terme plus risquée
La recherche-développement (R-D) est un moteur essentiel de la performance économique à long terme. Les pouvoirs publics jouent un rôle important en soutenant les investissements dans ce domaine, en particulier lorsque le secteur privé est réticent à engager des dépenses étant donné l’échelle des investissements requis, la non-exclusivité des résultats exploitables et le degré d’incertitude ou de risque qui entoure le projet.
Au cours de la période 2007-16, le total des investissements publics a baissé tant en pourcentage des dépenses publiques qu’en pourcentage du PIB dans presque tous les pays de l’OCDE (OCDE, 2017b). Il en résulte que les budgets publics de R-D se sont aplanis ou ont décliné dans de nombreux pays de l’OCDE et économies du G20. Si le niveau des budgets publics de R-D dans l’UE28 est resté globalement constant entre 2008 et 2015, ceux de la France et de l’Italie ont reculé en termes réels de plus de 20 %, et ceux de l’Espagne et de la Lettonie de plus de 30 %. Au contraire, les budgets de R-D des États-Unis et du Royaume-Uni ont commencé à repartir à la hausse après avoir baissé entre 2009 et 2012/13. Pendant ce temps, d’autres pays ont augmenté leur budget de R-D, le plus notablement la Turquie (progression de près de 80 %) et la Corée (progression de 50 %).
Dans certains cas, la baisse des budgets publics de R-D peut s’expliquer en partie par une réorientation des ressources vers d’autres instruments de soutien à l’innovation, par exemple des incitations fiscales à la R-D. Cependant, la modification des trains de mesures en faveur de la R-D peut avoir un impact sur le financement de la recherche à long terme plus risquée, car les incitations fiscales à la R-D visent généralement les entreprises, qui tendent à moins s’engager dans la recherche fondamentale que les autres secteurs.
Financer la recherche à long terme plus risquée
Les États financent des domaines de recherche très divers, mais augmentent aussi leur soutien aux activités de recherche à long terme plus risquées liées aux défis sociétaux tels que le changement climatique, l’alimentation de la population mondiale toujours plus nombreuse, et les problèmes de santé tels que la démence. En 2016, le budget public de R-D des États-Unis a atteint 149 milliards USD – soit plus que les neuf pays suivants combinés ; 60 % de cette somme était destinée à la R-D relative à la défense et à l’espace. Le Royaume-Uni et la Turquie sont les seuls autres pays de l’OCDE à consacrer 20 % ou plus de leur budget public de R-D à la défense et à l’espace. Les pourcentages applicables à la Chine, à Israël et la Fédération de Russie sont indisponibles.
Le progrès général des connaissances est le principal objectif socio-économique de beaucoup de pays parce qu’il inclut tous les crédits budgétaires consacrés à la R-D mais non rattachables à un objectif spécifique, ainsi que toute la R-D financée sur les subventions générales des ministères de l’Éducation. D’après les données plus détaillées disponibles pour un sous-ensemble de 15 pays européens, les sciences naturelles sont le principal récipiendaire de ces fonds pour la R-D.
De nombreux pays allouent une part appréciable de leurs financements à l’agriculture, l’environnement et l’exploration du milieu terrestre, dans la perspective de relever les grands défis sociétaux que sont l’alimentation durable de la population mondiale en augmentation et l’atténuation du changement climatique. La production industrielle, la technologie, l’énergie et les infrastructures recueillent également une proportion importante des financements. Au contraire, la part consacrée aux structures et relations sociales qui comprend la R-D liée à l’amélioration de l’offre éducative, est généralement relativement faible.
Dans la zone OCDE, les crédits budgétaires de R-D liés à la défense et à l’espace ont reculé en termes réels, de 32 % en 2006 à 24 % en 2016. Le gros de cette baisse a concerné le secteur de la défense, notamment en France (-80 %) et en Suède (-77 %). Seules la Corée et la Pologne ont augmenté leurs budgets de R-D dédiés à la défense. Au cours de la même période, les crédits budgétaires imputés au progrès général des connaissances ont été portés de 28 % à 32 %, ceux des autres domaines restant relativement stables.
Comment mesurer l’aide publique directe à la R-D
Les données relatives aux « crédits budgétaires publics de R-D » (CBPRD) recouvrent l’ensemble des crédits budgétaires financés par des recettes publiques (par exemple des recettes fiscales) inscrites au budget. Autrement dit, elles incluent les crédits alloués dans le cadre de la procédure budgétaire, mais excluent les unités extrabudgétaires et le financement de la R-D par des entreprises publiques. Globalement plus récentes que les données d’enquête sur la R-D, elles peuvent néanmoins ne pas suivre précisément la définition de la R-D du Manuel de Frascati de l’OCDE du fait du niveau de détail limité dans les systèmes budgétaires. De même, il peut être difficile de toutes les imputer à des objectifs socio-économiques précis. Dans certains cas, le financement d’un projet à long terme peut être alloué à la R-D en une seule année. Enfin, dans certaines économies du G20 (par exemple, la Chine et la Fédération de Russie), il n’est pas possible de distinguer l’aide budgétaire à la R-D des autres investissements publics dans les STI. Pour obtenir davantage de données, voir http://oe.cd/rds.
Un défi mondial : soigner la démence
La démence est, comme beaucoup de maladies neurodégénératives, une maladie débilitante pour laquelle il n’existe à l’heure actuelle aucun remède. Les coûts humains et financiers qu’elle engendre sont une préoccupation croissante, en particulier du fait du vieillissement de la population mondiale. La recherche scientifique étant un pilier des efforts entrepris pour relever ce défi mondial, l’OCDE a appelé à agir pour rééquilibrer les risques et les bénéfices de la recherche afin d’encourager une approche plus large qui aide à cibler la maladie à un stade précoce (OCDE, 2015b). Une analyse expérimentale des résumés de publications scientifiques des vingt dernières années montre que le nombre de travaux de recherche consacrés à la démence dans les pays les plus actifs en la matière a régulièrement augmenté jusqu’en 2012. Après cette date, la tendance haussière a ralenti dans la plupart de ces pays, y compris aux États-Unis où, selon les estimations, 1.2 % des crédits budgétaires publics de recherche avaient été imputés aux maladies neurodégénératives en 2012 (OCDE, 2015b). L’indexation incomplète des publications des dernières années, courante dans les bases de données bibliométriques mais qui devrait n’avoir impacté que les chiffres de 2015 et 2016, ne suffit pas à expliquer cette évolution. Cela étant, de grands progrès ont été enregistrés en Chine, où le nombre de travaux de recherche était faible à l’origine.
Comment recenser les documents relatifs à la démence
Ces estimations expérimentales se fondent sur des recherches des descripteurs « neurodegenerat* », « dementia » et « Alzheimer » dans les résumés des articles publiés (en anglais) entre 1996 et 2016 et indexés dans la base de données Scopus. Les maladies neurodégénératives incluent la maladie d’Alzheimer et la démence associée, la maladie de Huntington, la maladie de Parkinson et d’autres maladies des motoneurones. Même s’il existe un risque de retenir des documents non strictement pertinents (faux positifs), la difficulté principale est de réussir à identifier tous les documents pertinents avec les mots-clés choisis en limitant autant que possible l’incidence des faux négatifs sur le processus de sélection. Cette difficulté est accrue dans le cas de la recherche fondamentale sur le cerveau, quand le résumé ne fait allusion à aucune application spécifique. De plus, la précision de la méthode dépend de l’exhaustivité de l’indexation des résumés, ce qui entraîne un biais en faveur des revues anglophones.
Un défi mondial : soigner la démence
En recensant les champs disciplinaires des revues qui publient des articles sur la démence, on constate que les recherches dans ce domaine bénéficient de la contribution d’un large éventail de disciplines, qui vont des neurosciences et de la pharmacologie à la psychologie et aux soins infirmiers. Comme le montre également une récente analyse de l’OCDE relative aux crédits budgétaires publics pour la recherche sur les maladies neurodégénératives (OCDE, 2015b), les efforts de recherche (représentés par la production de publications) sont importants dans les disciplines visant à mieux comprendre les principes scientifiques fondamentaux à l’origine de la maladie (par exemple, neurosciences et biochimie). Les disciplines de la médecine (le nombre le plus important), des soins infirmiers et de la psychologie, font aussi référence à des travaux sur la recherche clinique et les soins de santé. Enfin, l’augmentation rapide du poids de l’informatique témoigne du rôle crucial que les données massives peuvent jouer dans l’analyse de la complexité de la démence en nous permettant de mieux cerner les facteurs de réduction des risques, ainsi que les soins et les traitements possibles.
Comment recenser les champs disciplinaires
Pour recenser les disciplines, on utilise la classification d’Elsevier qui affecte à chaque revue de la base Scopus un ou plusieurs sujets au moyen des codes ASJC (All Science Journal Classification). Cette classification comprend 27 domaines principaux et 334 sujets définis plus étroitement. On répartit les publications entre les domaines principaux en effectuant des comptages fractionnaires, et on affecte les documents publiés dans des revues généralistes en proportion des différents domaines de fond, en fonction de la distribution des codes ASJC des documents qui les citent et des documents qu’ils citent. De plus amples travaux sont nécessaires pour mieux comprendre l’ampleur et la nature de l’interdisciplinarité dans ce domaine. La preuve de cette interdisciplinarité est apportée notamment par des documents très cités sur l’application du graphène (un produit des nanotechnologies) à la détection précoce de la démence.
Ouvrir l’accès à la science
L’accès aux articles de recherche joue un rôle important dans la diffusion des connaissances scientifiques. Les moyens dont nous disposons désormais grâce au numérique facilitent le partage de ces connaissances et donc leur utilisation à des fins de recherche et d’innovation. La promotion du libre accès aux publications est pertinente pour favoriser la science ouverte (c’est-à-dire, les efforts déployés pour offrir à la communauté scientifique en particulier, et à la société en général, un accès plus large, au format numérique, aux résultats de la recherche financée sur fonds publics). D’après les résultats fournis par un nouvel indicateur expérimental fondé sur des requêtes en ligne de documents un an environ après leur publication, 60 % à 80 % des contenus parus en 2016 sont uniquement disponibles, un an après, moyennant un abonnement ou une redevance. La publication en libre accès dans une revue (voie dorée) est particulièrement visible au Brésil et dans beaucoup d’autres économies d’Amérique latine. L’auto-archivage en libre accès dans un référentiel (voie verte) prédomine pour les auteurs basés au Royaume-Uni. Aujourd’hui, il semble qu’environ 5 % des auteurs paient une redevance pour donner libre accès aux articles qu’ils publient dans des revues traditionnelles à abonnement (voie dorée hybride).
Dénombrer les documents en libre accès à l’aide d’outils en ligne
L’édition précédente de cette publication dénombrait les documents scientifiques en libre accès sur la base des résultats d’une enquête en ligne conduite par l’OCDE auprès des auteurs scientifiques du monde entier (http://oe.cd/issa). Dans cette édition, on utilise un indicateur obtenu en appliquant une requête informatique à un échantillon aléatoire (non stratifié) de 100 000 documents citables (articles, recensions et actes de conférences) publiés en 2016 et indexés dans la base de données Scopus avec un DOI valide associé (plus de 90 % des cas). La requête en question est une routine de type « wrapper », codée en langage R, conçue pour interroger l’interface de programmation d’application (API) oaDOI développée par l’organisation ImpactStory, dont les outils en libre accès disponibles en ligne visent à aider les chercheurs à partager leurs recherches et à en mesurer l’impact. L’évaluation, conduite en juin 2017, a consisté à déterminer le statut des documents de l’échantillon. L’API oaDOI renvoie des informations sur les possibilités d’obtenir gratuitement des copies légales des documents selon différents mécanismes :
La voie dorée indique que l’éditeur du document est listé dans le Dictionnaire des revues en libre accès, c’est-à-dire qu’il donne gratuitement et librement accès à ses contenus.
La voie dorée hybride indique que l’éditeur du document, qui facture généralement un abonnement à ses lecteurs, propose ce document précis en libre accès, normalement parce que l’auteur ou ceux qui le financent ont payé les frais de publication de l’article, et donc obtenu un droit de parution en libre accès (sur le modèle des revues qui appliquent l’approche de la voie dorée).
La voie verte indique que des versions légales du document existent dans des référentiels ou d’autres types d’archives, sans qu’aucune autre version ne soit accessible via la voie dorée ou la voie dorée hybride. Le nombre de documents de cette catégorie peut être sous-estimé si l’API oaDOI n’arrive pas à recenser toutes les copies ou versions presque identiques légalement disponibles.
Quand le DOI du document ne peut pas être mis en correspondance avec un moyen quelconque d’accès à l’information, il est affecté à la catégorie « aucune information » (statut non disponible), une catégorie particulièrement importante (supérieure à 15 %) en Chine. Quand le DOI peut être mis en correspondance avec des sources mais que l’API oaDOI indique qu’aucune version légale en libre accès n’est disponible, il est affecté à la catégorie « accès fermé ». C’est le cas, notamment, des documents sous embargo.
Ouvrir l’accès à la science
Évaluer dans quelle mesure les publications en libre accès sont plus citées que les autres peut aider les responsables de l’élaboration des politiques à estimer les coûts et les avantages sociaux des mécanismes de financement alternatif des publications scientifiques. Il a donc été entrepris de mesurer ce que l’on considère comme l’avantage du libre accès en termes de citation. Des résultats bibliométriques fondés sur le dernier ensemble de données disponibles confirment ceux d’une précédente enquête, qui présentaient une image contrastée (OCDE, 2015c ; Boselli et Galindo-Rueda, 2016) car toutes les formes de libre accès ne semblent pas conférer un avantage. En effet, si le libre accès est globalement associé à des taux de citation plus élevés dans le cas des documents recensés par les grands index de citation, la tendance n’est pas la même pour les documents publiés dans les revues en libre accès qui, plus récentes en moyenne, sont donc d’autant moins citées qu’on remonte dans le temps. La publication dans un référentiel (voie verte) confère elle systématiquement un avantage en termes de citation. Enfin, dans beaucoup de pays, les taux de citation sont plus élevés pour les documents publiés dans des revues à abonnement mais gratuitement accessibles en ligne car leur auteur a versé la redevance requise à l’éditeur (voie dorée hybride).
L’impact du libre accès au-delà des citations par les pairs
Les taux de citation sont des mesures imparfaites de l’impact scientifique, même si l’on normalise les résultats par domaine, cohorte et type de document. En particulier, et c’est l’une de leurs principales limitations, ils ne rendent pas compte de la pertinence et de l’utilité des activités de recherche auprès d’une plus large communauté d’utilisateurs potentiels de ces connaissances scientifiques, moins susceptibles de publier dans des revues spécialisées à comité de lecture (par exemple, médecins généralistes, inventeurs dans le secteur commercial, agents publics, etc.). L’étude ISSA1 de l’OCDE, conduite sur la base d’informations transmises par les auteurs eux-mêmes, montre que les documents en libre accès sont plus susceptibles d’être cités dans des contextes d’utilisation plus divers, par exemple dans des rapports de l’administration publique, des brevets, des affaires juridiques, des protocoles de soins, ou encore des documents de travail non soumis à des comité de lecture. Étant donné la place croissante du numérique dans nombre de ces contextes, on tend à utiliser davantage d’indicateurs fondés sur des données de l’internet pour étudier les formes plus larges d’impact des publications. Cependant, ces indicateurs ont pour inconvénient possible de risquer de mesurer la « popularité », donc de modifier les comportements si l’on s’en sert pour conduire des évaluations des recherches (http://oe.cd/blue-sky). L’analyse de la relation entre les différentes formes de libre accès aux documents scientifiques et l’impact des recherches semble mettre en lumière un découplage possible entre l’assurance de la qualité et la diffusion de l’information, deux rôles traditionnellement joués par les revues académiques.
Promouvoir la collaboration et la mobilité internationales
La collaboration entre acteurs d’un même pays ou de pays différents est une caractéristique universelle des activités de recherche et d’innovation et un moteur clé des échanges de connaissances. Pour mieux cerner le phénomène, on peut étudier les affiliations des co-auteurs de publications scientifiques et des co-inventeurs d’inventions brevetées. On observe ainsi que dans tous les pays BRIICS (cercles blancs) et de l’OCDE (cercles bleus), sauf en Inde et en Indonésie, le taux de publications conjointes internationales est supérieur à celui des co-inventions internationales. Si des économies scientifiquement et technologiquement avancées comme la Corée, les États-Unis et le Japon participent autant que les autres à des co-autorats internationaux, elles se démarquent par des niveaux différents de co-inventions, les inventeurs asiatiques étant en outre relativement moins engagés dans des activités de collaboration internationale. Les petites économies ouvertes tendent à enregistrer des taux de collaboration plus élevés. Des facteurs tels que la spécialisation scientifique et technologique, les opportunités de collaboration et la proximité géographique et institutionnelle peuvent contribuer à expliquer ces différences.
Comment interpréter les indicateurs
Les co-inventions internationales sont mesurées en calculant la part, dans le nombre total de brevets d’un pays donné, des demandes de brevets impliquant au moins un co-inventeur installé dans une économie différente. Les données se rapportent aux familles de brevets IP5 (inventions brevetées auprès des cinq grands offices de la propriété intellectuelle) déposées entre 2005 et 2015, par première date de dépôt et lieu de résidence de l’inventeur, avec comptages simples.
Le co-autorat international de publications scientifiques est mesuré en calculant la part, dans le nombre total d’articles produits par les établissements nationaux, des articles émanant d’au moins un auteur affilié à un établissement étranger (d’une économie ou d’un pays différent). À des fins de comparabilité avec les données sur les co-inventions, on utilise également le comptage simple. Les estimations présentées ici sont donc supérieures à celles que contient le Chapitre 3, qui reposent sur des comptages fractionnaires.
Promouvoir la collaboration et la mobilité internationales
Les indicateurs de la mobilité scientifique internationale, établis sur la base des changements d’affiliation des auteurs, révèlent que la mobilité est surtout caractérisée par une circulation des chercheurs (renouvellement des « cerveaux ») plutôt que par des déplacements unidirectionnels (gains ou pertes de « cerveaux »). Cependant, l’analyse des flux nets d’entrée et de sortie des auteurs scientifiques au cours du temps peut donner beaucoup d’informations sur la réaction de la communauté scientifique aux événements ou politiques nationales en lien avec le financement de la recherche scientifique, le soutien à la mobilité scientifique internationale et les mesures visant à attirer les plus qualifiés. Les données sur les flux nets enregistrés depuis 2001 montrent que la Suisse, les États-Unis et l’Australie attirent le plus de scientifiques, juste devant la Chine qui, après avoir affiché des niveaux élevés de sorties nettes, est désormais celle des grandes économies qui enregistre le plus d’entrées nettes. Aux États-Unis, la balance positive diminue depuis quelques années. Le Japon et l’Inde accumulent les sorties nettes, tandis que la Fédération de Russie attire davantage d’auteurs scientifiques depuis 2014. L’UE28, devenue bénéficiaire nette pendant une courte période en 2008-09, a enregistré un déficit très important après 2011. Sur l’ensemble des 15 dernières années, le nombre d’auteurs scientifiques qui en sont partis est supérieur de près de 36 000 à celui des auteurs scientifiques qui s’y sont installés, ce qu’explique en partie la mobilité de retour des scientifiques qui étaient venus y faire leurs études avant de devenir des auteurs publiés. Au sein même des grands pays de l’UE, il existe des différences notables : le Royaume-Uni a attiré des scientifiques en 2014-16 tandis que l’Espagne a rejoint l’Italie à la tête du classement des économies très productrices de contenus scientifiques qui voient partir davantage de scientifiques qu’elles n’en accueillent.
Comment lire ce graphique
Le graphique décompose le flux global net des auteurs scientifiques dans les pays de l’OCDE et les économies BRIICS entre 2001 et 2016, en termes relatifs. Il permet de mettre en évidence la chronologie et l’intensité des différentes phases d’entrées et de sorties nettes du point de vue d’un pays donné. Ainsi, l’Allemagne et l’Espagne ont enregistré une perte nette cumulée de même ordre au cours de la période (valeur représentée par un losange sur l’axe de droite). Toutefois, en Espagne, cette évolution est le résultat d’une phase de sorties nettes modérées dans les années 2000 puis d’un important flux net de sorties d’auteurs scientifiques après la crise. Au contraire, la tendance observée en Allemagne est relativement plus stable, et son déficit a baissé ces dernières années.
Établir un suivi des changements d’affiliation des scientifiques à partir des registres mondiaux des publications fournit une source complémentaire d’informations détaillées, mais ces informations sont limitées aux auteurs qui publient régulièrement : dans le cas contraire, les affiliations ne peuvent être détectées et datées avec suffisamment de précision. De plus, il n’est possible de calculer la mobilité que pour les auteurs d’au moins deux publications. Ces indicateurs sous-estiment en outre vraisemblablement les flux par pays et par domaine qui impliquent une mobilité vers un secteur ou des établissements dans lesquels la publication dans des revues spécialisées n’est pas la norme. Enfin, la mesure de la mobilité peut être difficile à distinguer de celle de la collaboration dans le cas des auteurs affiliés à plusieurs établissements dans différents pays. Dans ce cas, on a procédé à des comptages fractionnaires.
Soutenir l’innovation des entreprises
Le soutien public à la R-D des entreprises vise à encourager celles-ci à investir dans des connaissances pouvant déboucher sur des innovations à même de transformer les marchés et les activités et, partant, de bénéficier à toute la société. Pour inciter les entreprises à s’engager dans la R-D, les pouvoirs publics peuvent avoir recours à divers dispositifs. En 2017, 30 des 35 pays de l’OCDE ont proposé des allègements fiscaux en plus de l’aide directe traditionnellement apportée sous forme notamment de subventions et de contrats, alors qu’ils n’étaient que 16 à le faire en 2000. Les grandes entreprises, où se concentrent la majeure partie des activités de R-D, tendent à être les principales bénéficiaires des aides directes et fiscales accordées pour soutenir les dépenses intérieures de R-D des entreprises (DIRDE). Une nouvelle analyse de l’OCDE apporte des éclairages sur la répartition des aides en fonction de la taille des entreprises dans un certain nombre de pays. La part des aides fiscales à la R-D qui revient aux PME varie de 5 % en Hongrie à 71 % en Lettonie et 79 % en Norvège (petites entreprises uniquement). Si le soutien direct relève le plus souvent de mesures discrétionnaires, la part de l’aide fiscale destinée aux PME tend à être plus étroitement corrélée à la part de celles-ci dans les DIRDE, ce qui tend à prouver que les incitations fiscales sont généralement, dans la panoplie des mesures de soutien public direct à la R-D, un instrument stimulé par la demande. Il est intéressant de noter que l’Autriche, le Canada, la France, la Norvège, les Pays-Bas et le Royaume-Uni allouent aux PME une part plus importante des aides fiscales que des aides directes. Tous ces pays ont mis en place des crédits d’impôt qui ciblent en priorité les plus petites entreprises actives en R-D : celles-ci peuvent ainsi bénéficier des crédits même lorsque l’impôt qu’elles doivent est inférieur au montant total alloué, la différence leur étant versée en totalité ou en partie par l’administration.
Comment mesurer les aides fiscales à la R-D
Les estimations établies par l’OCDE du coût des allègements fiscaux en faveur de la R-D sont associées aux données sur le financement direct de la R-D, telles que communiquées par les entreprises dans le cadre d’enquêtes sur la R-D, afin d’obtenir un tableau plus complet des initiatives publiques à l’appui de la R-D des entreprises. On peut alors avoir un suivi de ces initiatives au fil du temps. Le recueil de données de l’OCDE sur les incitations fiscales à la R-D (qui en est à sa cinquième édition) s’efforce de mettre en lumière et d’analyser les différences subtiles au niveau du traitement fiscal de la R-D, les systèmes fiscaux de référence pertinents et les approches en matière de métrique. Des experts nationaux des indicateurs de la science et de la technologie ont travaillé en collaboration avec des administrations fiscales et des administrations chargées des finances publiques afin de fournir des données aussi comparables à l’échelle internationale et à jour que possible. Dans la mesure du possible, le coût estimé des dispositions accordant un traitement préférentiel aux dépenses de R-D des entreprises est rapporté à une référence commune (déductibilité totale des dépenses courantes de R-D). Ces estimations rendent compte de la somme du manque à gagner fiscal – calculé selon le principe de la comptabilité d’exercice – et des remboursements d’impôts, le cas échéant. La dernière édition du Manuel de Frascati de l’OCDE inclut un nouveau chapitre consacré à la mesure des incitations fiscales à la R-D (OCDE, 2015e), voir http://oe.cd/frascati.
L’indicateur spécifique présenté ici est expérimental. La comparabilité internationale des données peut être limitée (par exemple, parce que les définitions des PME ne sont pas les mêmes aux fins de la comptabilisation de la R-D des entreprises et des allègements fiscaux en faveur de la R-D). Pour les DIRDE et les DIRDE financées par l’État, les PME s’entendent généralement des entreprises de 1 à 249 salariés (c’est-à-dire, à l’exclusion des entreprises de zéro salarié), sauf mention contraire. Mais un certain nombre de pays appliquent des critères supplémentaires pour définir les PME. Pour de plus amples informations sur les définitions des PME, voir http://oe.cd/sb2017_notes_rdtax.
Soutenir l’innovation des entreprises
L’intensité de la R-D du secteur des entreprises affiche une corrélation positive (0.3) avec le niveau de financement public de ce secteur de R-D dans presque tous les pays, quelques exceptions étant à noter. L’Allemagne et la Corée présentent des intensités de R-D relativement élevées dans les entreprises par rapport à leur niveau de soutien public, alors que la France, la Hongrie et la Fédération de Russie présentent des taux de soutien supérieurs à ceux de pays dont le rapport entre la R-D des entreprises et le PIB est pourtant similaire. Un indicateur complémentaire compare l’évolution du soutien public à la R-D et de l’intensité de la R-D du secteur des entreprises. Entre 2006 et 2015, les pays dans lesquels le soutien public a connu la plus forte progression ont aussi connu une croissance plus élevée de l’intensité de R-D. En Chine et en Corée, la croissance de l’intensité de la R-D a été supérieure à celle que laissait prévoir la variation du soutien public. Celle-ci semble être à l’origine d’environ 17 % de la variation observée de l’intensité de la R-D des entreprises au cours de la période 2006-15. Une analyse supplémentaire montre que cette variation expliquée est due, pour deux tiers, à l’évolution des aides directes et, pour le tiers restant, à l’évolution des aides fiscales.
Financer l’entrepreneuriat et l’innovation
Les petites entreprises nouvelles et innovantes peuvent financer leurs activités par l’emprunt ou par des fonds propres. Dans ce deuxième cas, le capital-risque et le capital apporté par des investisseurs providentiels (« business angels ») constituent des sources importantes, en particulier pour les jeunes entreprises axées sur les technologies. Les données disponibles au niveau des entreprises montrent qu’en 2016, les investissements en capital-risque se sont concentrés principalement sur le secteur des TIC, en particulier dans des pays tels que l’Espagne, l’Estonie et la République slovaque. En Europe, des données de 2015 montrent que plus d’un tiers des contrats passés avec des investisseurs providentiels concernaient le secteur des TIC, tandis qu’aux États-Unis, des données de 2016 indiquent que 45 % de tous les accords portaient sur le logiciel, l’internet ou la téléphonie mobile.
Mesurer le capital-risque et le capital apporté par des investisseurs providentiels
Les données sur le capital-risque proviennent principalement d’associations de capital-risque nationales ou régionales et de fournisseurs de données du secteur privé. Il n’existe pas de définition type au niveau international du capital-risque ou de la ventilation des investissements de capital-risque par stade de développement et par secteur d’activités. La base de données de l’OCDE sur le financement de l’entrepreneuriat agrège des données originales pour correspondre à la classification OCDE du capital-risque par stade de développement et par groupe de secteurs d’activités. Le renforcement de la coopération entre fournisseurs nationaux/régionaux de données sur le capital-risque devrait améliorer la disponibilité des données et fournir des informations comparables à l’échelle internationale sur l’investissement de capital-risque dans les différents secteurs et les différents pays. Les données sur le capital apporté par des investisseurs providentiels proviennent des enquêtes conduites par les associations d’investisseurs providentiels auprès des réseaux et des groupes de tels investisseurs. Elles sont difficiles à évaluer du fait de la discrétion de ces financements (ce qui conduit à parler de « marché invisible ») et des différences entre pays au niveau de ce que l’on choisit de définir comme un investisseur providentiel. En outre, les données recueillies dans le cadre d’enquêtes sont généralement sujettes à des incohérences, d’abord parce que le nombre de répondants n’est pas le même d’une année à l’autre, ensuite parce que la couverture du marché est incomplète (OCDE, à paraître).
Financer l’entrepreneuriat et l’innovation
Les indicateurs expérimentaux fondés sur les données détaillées de la source Crunchbase© révèlent que la majorité des financements sur fonds propres destinés à des start-ups axées sur le numérique se retrouve dans les secteurs des applis, des données et de l’analytique de données. Entre 2011 et 2016, la part de ces secteurs dans l’ensemble des financements sur fonds propres d’entreprises axées sur le numérique s’est élevée à 80 % en Estonie et en Lettonie, et à 70 % en Chine.
Ce que nous apprend Crunchbase©
Le site Crunchbase© fournit des informations sur l’activité et le financement des start-ups dans les différents pays du monde. Les variables disponibles sont notamment la taille de l’entreprise, son emplacement (ville et région), le rôle des acteurs concernés (firme, groupe, investisseur, université), le statut (en activité, acquisition, introduction en bourse, ou fermé), sa date de création et les dates auxquelles l’enregistrement a été créé et mis à jour. Pour de plus amples informations, voir Dalle, Denbesten et Menon (à paraître). Dans les graphiques présentés ici, l’échantillon est limité aux entreprises créées après 2010 (donc qui avaient cinq ans d’ancienneté ou moins en 2016) et qui ont attiré des financements sur fonds propres au cours de la période 2011-16. Le financement sur fonds propres inclut le capital-risque et d’autres financements à risque tels que les capitaux apportés par des investisseurs providentiels ou le financement par emprunt. Les activités liées au numérique sont répertoriées sur la base d’une correspondance entre les secteurs listés dans la base de données et les codes de la CITI rév. 4. Il convient de considérer les résultats rapportés ici comme une première exploration des données de Crunchbase© aux fins d’une analyse statistique et économique.
Promouvoir l’excellence scientifique
Quelle est l’efficacité des différents mécanismes de financement de la recherche scientifique ? Un nouvel indicateur expérimental, fondé sur les remerciements que les auteurs scientifiques adressent à des financeurs dans leurs articles publiés, permet d’appréhender la mesure dans laquelle ces chercheurs réussissent à pérenniser des financements directs pour leur recherche. Cette méthode fournit une vision ascendante approximative, du point de vue des chercheurs, de l’amplitude des financements d’activités spécifiques (sans doute en concurrence les unes avec les autres pour ces financements) en lien avec la production scientifique. Les auteurs qui ne citent aucun financeur en particulier sont plus susceptibles de dépendre de ressources institutionnelles pour leurs travaux et leurs propres salaires. Les auteurs basés en Chine, en Corée et aux États-Unis – des économies où le financement par projet est très courant – sont les plus à même de remercier des sources de financement dans leurs articles. Au contraire, les auteurs basés en France et en Italie affichent certains des taux de remerciements de financeurs les plus bas, ce qui témoigne de l’importance relativement plus élevée des financements institutionnels dans ces pays. Une comparaison des profils de citation au sein des différents pays montre que les remerciements pour financement sont associés à un taux d’excellence beaucoup plus élevé, mesuré comme la proportion de chaque catégorie qui figure parmi les 10 % de documents les plus cités dans leur domaine et dans leur cohorte. Cette observation peut laisser entendre que les financeurs sélectionnent les activités à même d’avoir le plus d’impact, ou être le reflet des avantages dont bénéficient les chercheurs qui obtiennent des financements supplémentaires. Évaluer l’efficacité relative d’autres mécanismes d’allocation des ressources nécessite de plus amples informations sur les montants des financements et les mécanismes de sélection appliqués au niveau micro-économique. Il faudrait pour cela une infrastructure de données plus fine pour compléter le panorama descendant fourni par les statistiques sur les budgets publics de R-D.